68 % des salariés expriment une “satisfaction globale au travail”. Un signe encourageant ? Pas si sûr. Car dans le même temps, 43 % disent ressentir un “mal-être” au travail.
Un paradoxe mis en lumière par le Baromètre national des causes racines du mal-être au travail, publié le 5 juin par Ekilibre Conseil et OpinionWay.
Alors, comment expliquer cette tension entre satisfaction affichée et malaise latent ? Que révèlent réellement les chiffres ? Décryptage.
Mal-être au travail : une urgence silencieuse
Sur les 1025 salariés interrogés dans le cadre de l’étude, 8 sur 10 se déclarent concernés par une fatigue professionnelle, et 66% vivent un stress quotidien.
Des signaux forts d’un épuisement généralisé, dont les effets ne sont pas anodins : 20 % des salariés interrogés déclarent avoir été en arrêt maladie au cours des six derniers mois pour des raisons liées au travail – qu’il s’agisse de burn-out, de douleurs physiques ou de troubles psychiques.
Ces données dressent un constat sans appel : en 2025, le mal-être au travail n’est plus un cas isolé, mais une réalité vécue par une majorité. Et si 68 % des salariés se disent “globalement satisfaits”, ce contraste révèle un paradoxe inquiétant. La notion de bien-être semble mal définie, voire sous-estimée, alors même que ses indicateurs les plus critiques sont en alerte rouge. Il est temps d’ouvrir les yeux sur une souffrance souvent tue, mais profondément ancrée.
Des violences banalisées sur le lieu de travail
L’étude tire également la sonnette d’alarme sur les violences au travail : un quart des salariés affirme avoir déjà été exposé à des violences dans leur environnement professionnel. Parmi ces victimes, 58% dénoncent un harcèlement moral et 19%, des situations de harcèlement sexuel ou des comportements sexistes.
Ces chiffres traduisent une réalité troublante : les violences au travail ne relèvent pas de cas marginaux, mais d’un phénomène structurel, souvent toléré, parfois ignoré. Pour beaucoup de salariés, la peur de représailles ou l’absence de soutien les conduit à se taire. Le silence, ici, devient complice de la banalisation.
La violence au travail n’est pas toujours spectaculaire. Elle est souvent insidieuse, quotidienne, et d’autant plus destructrice qu’elle est invisible aux yeux des autres. C’est pourquoi il est urgent de passer d’une tolérance implicite à une véritable politique de prévention, d’écoute et de sanction.
À la racine du mal-être en entreprise
Qu’est-ce qui alimente réellement le mal-être au travail ? À en croire les répondants de l’étude, trois facteurs dominent :
- Le rythme élevé de travail
- Les changements imprévus (liés notamment au manque d’effectif)
- Le fait de devoir dissimuler leurs émotions pour rester professionnels, quitte à s’épuiser
Le Baromètre national des causes racines du mal-être au travail est sans équivoque : ce ne sont pas tant les fragilités individuelles ou les aléas contextuels qui pèsent, mais bien les dysfonctionnements organisationnels. Charge mentale excessive, pression émotionnelle, absence d’écoute, manque de reconnaissance, moyens insuffisants… Des éléments systémiques qui, ensemble, érodent le bien-être au quotidien.
Autant d’enjeux qui prennent un relief particulier à l’approche de la Semaine pour la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT), prévue du 17 au 21 juin 2025 – un moment clé pour engager enfin une réflexion de fond, au-delà des bonnes intentions.
Des dispositifs insuffisants en entreprise
Les entreprises ne prennent pas la pleine mesure de cette réalité. En effet, 55% estiment que leur entreprise n’agit pas concrètement pour préserver leur santé mentale. Plus inquiétant encore : plus de 50% des salariés ne savent pas vers qui se tourner en cas de souffrance psychologique au travail dans leur organisation.
Ce diagnostic appelle une réponse structurelle, et non superficielle : il faut repenser en profondeur les pratiques de management, rééquilibrer les charges de travail, et surtout, remettre l’humain au cœur des décisions. Autrement dit, déployer une politique de prévention des risques psychosociaux (RPS) à la fois ambitieuse, claire et opérationnelle, à la hauteur des enjeux.