Phase clé pour les salariés comme pour les employeurs, la période d’essai permet aux deux parties de s’évaluer mutuellement, afin de déterminer s’ils souhaitent pérenniser leur collaboration. Mais, lorsque que des doutes subsistent, est-il possible de renouveler la période d’essai ? Et si oui, sous quelles conditions ? Et pendant combien de temps ? Petit guide à destination des entreprises et des salariés.
Pourquoi renouveler la période d’essai d’un salarié ?
La période d’essai – au même titre que l’entretien d’embauche ou bien l’onboarding – représente un moment clé du parcours professionnel, et ce aussi bien pour le salarié que pour l’entreprise qui le recrute.
En effet, ce délai de plusieurs mois a pour objectif de déterminer si la relation de travail peut perdurer au-delà de la période d’essai.
Côté employeur d’une part, pour estimer si les compétences du salarié correspondent bien au poste, et s’il s’adapte à l’équipe et la culture d’entreprise. Côté salarié d’autre part, afin que celui-ci puisse jauger s’il se sent à l’aise dans son nouveau poste ainsi qu’au sein de l’entreprise.
Dans certains métiers, la durée de la période d’essai n’est pas suffisante pour que les deux parties puissent se faire un avis éclairé. Aussi, renouveler la période constitue un bon moyen d’écarter les doutes.
Attention toutefois à ne pas renouveler la période d’essai systématiquement, auquel cas ceci pourrait être considéré comme une pratique abusive de la part de l’entreprise aux yeux d’un juge.
Ce qu’il faut savoir avant
Les conditions pour pouvoir renouveller la période d’essai d’un salarié
Le renouvellement d’une période d’essai n’est pas automatique : il doit répondre à des règles strictes afin d’être valable juridiquement.
-
Une clause expresse dans le contrat de travail ou la convention collective
Le renouvellement ne peut intervenir que si cette possibilité est expressément prévue soit :
- dans le contrat de travail signé par le salarié,
- soit dans la convention collective applicable à l’entreprise.
Si ce n’est pas le cas, le renouvellement est nul.
-
L’accord écrit et clair du salarié
Le salarié doit donner son accord au renouvellement de sa période d’essai. Cet accord se formalise obligatoirement par écrit, via un avenant au contrat.
Un simple silence ou une absence de réponse ne vaut pas acceptation.
-
Le respect des durées maximales légales
La loi fixe des plafonds stricts, renouvellement compris. Par exemple :
-
2 mois maximum pour les ouvriers et employés,
-
3 mois maximum pour les agents de maîtrise et techniciens,
-
4 mois maximum pour les cadres.
Ces durées peuvent être aménagées par la convention collective, mais elles ne doivent jamais être dépassées.
-
-
Une décision prise avant la fin de la période initiale
Le renouvellement doit être acté avant le terme de la première période d’essai. Une décision prise après coup est considérée comme invalide.
-
Une justification objective
Même si la loi n’impose pas de motif détaillé, l’entreprise doit être en mesure de justifier que le renouvellement est lié à l’évaluation des compétences ou à des besoins concrets.
Les motifs pour renouveler une période d’essai
Le renouvellement d’une période d’essai n’a pas vocation à devenir systématique : il doit répondre à une logique claire et objective. En pratique, plusieurs situations peuvent justifier qu’un employeur propose une prolongation de ce délai d’évaluation :
-
Le temps d’intégration plus long que prévu
Certains postes, notamment techniques ou à forte responsabilité, nécessitent un temps d’adaptation supérieur à la durée initiale de la période d’essai. Le renouvellement peut permettre au salarié de mieux appréhender ses missions et de montrer son potentiel sur une durée plus représentative.
-
L’acquisition de compétences spécifiques
Dans certains métiers, la maîtrise de logiciels, de process internes ou de méthodes particulières ne peut s’acquérir en quelques semaines. Le renouvellement donne ainsi au salarié l’opportunité de démontrer sa montée en compétence.
-
Des absences ou circonstances particulières
Si le salarié a été absent (maladie, congés, formation) ou si l’entreprise a traversé une période inhabituelle (forte baisse d’activité, changement organisationnel, transition managériale), il peut être pertinent de prolonger la période d’essai afin que l’évaluation repose sur une période réellement représentative.
-
Un besoin d’observation supplémentaire de la part de l’employeur
Lorsque des doutes subsistent sur l’adéquation entre le salarié et le poste (niveau de performance, autonomie, intégration dans l’équipe, alignement avec la culture d’entreprise), l’employeur peut estimer qu’un délai complémentaire est nécessaire pour trancher de manière éclairée.
À noter : ces motifs ne sont pas inscrits dans la loi comme une liste exhaustive, mais l’entreprise doit toujours être en mesure de démontrer leur objectivité. Un renouvellement sans raison valable pourrait être interprété comme abusif et contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes.
Comment fonctionne le délai de prévenance ?
Le délai de prévenance correspond au laps de temps pendant lequel l’employeur ou le salarié est tenu de notifier son intention de renouveler la période d’essai.
Si le renouvellement est à l’origine de l’employeur, la délai de prévenance dépend de la durée pendant laquelle le salarié est resté au sein de l’entreprise :
- Inférieure à 8 jours = 24 heures
- Entre 8 jours et 1 mois = 48 heures
- Entre 1 mois et 3 mois = 2 semaines
- Plus de 3 mois = 1 mois
Si le renouvellement a été initié par le salarié, le délai de prévenance dépend des mêmes modalités :
- Inférieure à 8 jours = 24 heures
- Supérieure à 8 jours = 48 heures
Dans tous les cas, l’accord doit être daté antérieurement à la fin de la période d’essai initiale. Un élément important à garder en tête, notamment si vous envisagez de transmettre des documents par courrier.
Qui peut demander à renouveler la période d’essai ?
Le renouvellement de la période d’essai n’est pas à l’initiative exclusive de l’employeur : les deux parties au contrat de travail – salarié comme employeur – peuvent en faire la demande.
- Côté employeur : il peut proposer un renouvellement lorsqu’il estime ne pas disposer d’assez d’éléments pour évaluer pleinement les compétences du salarié, son intégration dans l’équipe ou son adaptation aux méthodes de travail de l’entreprise. Cette démarche doit rester exceptionnelle et justifiée.
- Côté salarié : le collaborateur peut lui aussi solliciter un renouvellement s’il considère avoir besoin de plus de temps pour appréhender son poste, gagner en assurance ou démontrer ses compétences. Cela peut être le cas par exemple après une absence, une formation en cours, ou lorsqu’il ressent encore un besoin d’adaptation à l’organisation.
Dans tous les cas :
- le renouvellement ne peut pas être imposé unilatéralement ;
- il doit faire l’objet d’un accord écrit et signé par les deux parties ;
- l’initiative de l’une des parties n’a de valeur que si l’autre donne expressément son consentement.
Quelle différence avec une prolongation de période d’essai ?
Alors que le renouvellement prévoit de reconduire la durée initiale prévue pour la période d’essai, la prolongation, elle, intervient en cas d’absence du salarié. Et ce, indépendamment du motif de son absence (congé maternité, arrêt maladie, RTT…). La durée de la prolongation doit être égale à celle de son absence. Contrairement au renouvellement, la prolongation de la période d’essai est automatique.
De quelle durée peut être renouvelée une période d’essai ?
La durée du renouvellement d’une période d’essai varie selon le type de contrat de travail. Dans tous les cas, elle ne peut jamais conduire à dépasser les plafonds fixés par la loi (ou par la convention collective si celle-ci prévoit des durées plus courtes).
Le renouvellement de la période d’essai en CDI
Pour un contrat à durée indéterminée (CDI), la loi fixe une durée maximale incluant le renouvellement :
- Ouvriers et employés : 2 mois maximum (renouvellement compris),
- Agents de maîtrise et techniciens : 3 mois maximum (renouvellement compris),
- Cadres : 4 mois maximum (renouvellement compris).
En pratique, cela signifie qu’un employé ayant une période d’essai initiale de 1 mois peut voir celle-ci renouvelée pour 1 mois supplémentaire au maximum, et non 2.
Le renouvellement de la période d’essai en CDD
Dans le cadre d’un CDD, la période d’essai est fixée en fonction de la durée du contrat :
- CDD de 6 mois ou moins : la période d’essai est limitée à 1 jour par semaine de contrat, dans la limite de 2 semaines, renouvellement compris.
- CDD de plus de 6 mois : la période d’essai ne peut pas dépasser 1 mois, renouvellement compris.
Ainsi, le renouvellement n’est possible que si la durée maximale légale n’est pas atteinte.
Le renouvellement de la période d’essai en contrat d’intérim
Pour les salariés en intérim, la période d’essai dépend de la durée de la mission :
- Contrat de moins de 1 mois : 2 jours ouvrés maximum (renouvellement compris),
- Contrat entre 1 et 2 mois : 3 jours ouvrés maximum (renouvellement compris),
- Contrat de plus de 2 mois : 5 jours ouvrés maximum (renouvellement compris).
Le renouvellement n’est donc possible que si la période initiale est plus courte que ces plafonds.
Quelle est la procédure pour renouveler la période d’essai ?
Faire un entretien préalable pour l’annoncer au salarié
Le renouvellement de la période d’essai ne doit pas être une décision unilatérale de l’entreprise – ni du salarié : il s’agit d’un moment clé de dialogue entre l’employeur et le salarié.
Avant de formaliser le tout par écrit, il est fortement recommandé d’organiser un entretien préalable afin d’aborder la situation de manière transparente.
Cet échange a plusieurs objectifs :
- Présenter les raisons du renouvellement : expliquer les éléments qui motivent cette proposition (besoin d’un temps supplémentaire pour évaluer certaines compétences, intégration progressive, absences…).
- Valoriser les points positifs : mettre en avant les réussites et qualités observées depuis le début de la période d’essai, afin que le salarié ne perçoive pas le renouvellement uniquement comme une mise en cause.
- Donner des axes d’amélioration clairs : indiquer précisément les aspects qui nécessitent encore une confirmation ou des progrès, et proposer des moyens d’accompagnement (formation, suivi, objectifs concrets).
- Recueillir la position du salarié : laisser la possibilité au collaborateur d’exprimer son ressenti, ses éventuelles difficultés ou besoins, et vérifier s’il est disposé à poursuivre dans ce cadre.
Un tel entretien permet de sécuriser la démarche, d’instaurer un climat de confiance, et d’augmenter les chances que le salarié accepte le renouvellement dans de bonnes conditions.
Contractualiser le renouvellement avec le salarié
À l’issue de l’entretien préalable, si les deux parties sont d’accord pour prolonger la période d’essai, il est impératif de formaliser la décision par écrit.
Deux situations sont possibles :
- Le contrat de travail ne mentionne pas la possibilité de renouveler la période d’essai : dans ce cas, il faut réaliser un avenant au contrat de travail.
- Le contrat de travail inclut la possibilité d’un renouvellement de la période d’essai : nul besoin de réaliser un avenant. En revanche, vous devrez faire un accord écrit (de la part du salarié ou de l’employeur), signés par les deux parties, avec une mention formulant acceptation.
Il faudra également préciser la nouvelle durée de la période d’essai et sa date de fin.
À noter qu’un renouvellement bien géré s’inscrit dans une démarche globale de gestion des ressources humaines et de fidélisation des talents. Il ne doit pas être perçu comme une sanction, mais comme un temps supplémentaire accordé pour consolider la relation de travail et favoriser la réussite du salarié. Dans cette logique, il complète et prolonge les efforts déjà engagés pour assurer un bon onboarding.
FAQ
Que se passe-t-il si le renouvellement n’est pas conforme ?
Si l’une des conditions légales n’est pas respectée (absence de clause dans le contrat ou la convention collective, accord du salarié non recueilli par écrit, dépassement des durées maximales…), alors le renouvellement est considéré comme nul et non avenu.
Dans ce cas, la relation de travail se poursuit en CDI sans période d’essai. Autrement dit, l’employeur ne peut plus rompre le contrat librement comme il l’aurait pu pendant l’essai, mais doit suivre la procédure de licenciement classique.
Un employé peut-il refuser un renouvellement de période d’essai ?
Oui. Le renouvellement n’a aucune valeur sans l’accord exprès du salarié. Celui-ci peut parfaitement refuser la proposition de l’employeur.
Deux cas de figure :
- Le salarié refuse, mais souhaite rester dans l’entreprise : la période d’essai se poursuit jusqu’à son terme initial, puis le contrat se poursuit en CDI s’il n’est pas rompu avant.
- Le salarié refuse et souhaite quitter l’entreprise : il peut mettre fin à la période d’essai en respectant son délai de prévenance.