Les offres d’emploi cadres ont chuté de 23 %. C’est l’un des chiffres clés dévoilés dans la dernière étude Robert Walters sur la rémunération et l’emploi des cadres, parue le 4 décembre. Entre ralentissement des recrutements et exigences toujours élevées, on a décrypté pour vous les principaux enseignements à retenir de cette enquête.
Des recrutements plus rares… mais plus ciblés
Premier constat de l’enquête Robert Walters : les entreprises recrutent moins, mais de manière plus ciblée.
Le recours aux cabinets de recrutement a lui aussi diminué : la part des recrutements de cadres confiés à des intermédiaires spécialisés est passée de 41 % à 30 % en un an.
Les cabinets sont désormais sollicités surtout pour :
- des postes à fort enjeu stratégique,
- des recrutements confidentiels,
- des fonctions difficiles à pourvoir en raison de la localisation ou de la rareté du profil.
Dans un contexte économique et politique instable, près de 4 entreprises sur 10 déclarent avoir ralenti ou gelé leurs recrutements en 2025.
Résultat : les embauches se concentrent davantage sur des remplacements, avec une forte recherche de profils “sur-mesure” capables d’être opérationnels immédiatement.
Parallèlement, un grand nombre d’organisations choisit de redistribuer les missions en interne plutôt que de recruter. Près de la moitié des entreprises ayant connu des départs disent avoir réparti les compétences sur les équipes existantes, quitte à automatiser certaines tâches.
Un choix qui permet de limiter les coûts à court terme, mais qui fait planer le risque de surcharge de travail et de démotivation.
Moins d’offres, mais toujours des difficultés à recruter
Paradoxalement, même avec moins de postes ouverts, les entreprises continuent de parler de “pénurie de candidats”.
68 % d’entre elles affirment rencontrer des difficultés de recrutement, contre 84 % l’année précédente : un niveau encore très élevé, mais en léger recul.
Les obstacles avancés restent sensiblement les mêmes :
- des attentes salariales jugées trop hautes,
- un nombre limité de candidatures pertinentes,
- des profils très sollicités, notamment sur les métiers techniques ou experts.
Certains candidats, notamment dans la tech ou sur des fonctions stratégiques, préfèrent rester en poste plutôt que de prendre un risque dans un contexte incertain. Cela contribue à tendre encore davantage le marché sur certains métiers.
Des cadres toujours très exigeants
Côté candidats, l’étude montre que les cadres n’ont pas “revu leurs exigences à la baisse”.
Ils restent particulièrement attentifs à :
- la rémunération, qui demeure le premier critère de satisfaction,
- la qualité des missions (impact, intérêt du poste, niveau de responsabilité),
- les perspectives d’évolution à moyen terme.
Pour beaucoup, changer de poste n’a de sens que si l’opportunité est clairement supérieure : meilleur salaire, meilleur contenu de poste, meilleure trajectoire de carrière… ou idéalement les trois à la fois. À cela s’ajoute un attachement de plus en plus marqué à l’équilibre vie pro / vie perso.
Près de 8 cadres sur 10 souhaitent que leur entreprise en tienne davantage compte, que ce soit via le télétravail, l’organisation du temps de travail ou la charge de missions.
IA : un outil utile, mais qui interroge
L’étude se penche également sur la place prise par l’IA dans les processus RH.
Côté entreprises, environ 4 sur 10 utilisent déjà l’IA – ou envisagent de le faire -, notamment pour rédiger des annonces, trier des CV, mener des tests ou automatiser certaines étapes du recrutement.
L’objectif est d’aller plus vite et de traiter de plus gros volumes de candidatures.
Mais cette automatisation soulève plusieurs inquiétudes : qualité des données, respect du RGPD, risque de discrimination, déshumanisation des échanges, perte de profils “atypiques” qui pourraient pourtant apporter beaucoup à l’entreprise.
Autre paradoxe : alors que de plus en plus de candidats réfléchissent à utiliser l’IA pour préparer leurs candidatures (CV, lettre, argumentaire), une partie des recruteurs voit d’un mauvais œil ces candidatures jugées moins authentiques.
Une envie de bouger… mais avec prudence
La mobilité des cadres reste, elle, relativement stable : un peu plus d’un sur deux se dit prêt à changer d’emploi dans les 12 mois.
Les raisons de vouloir partir ne surprennent pas :
- mauvaise qualité du management,
- envie d’évoluer plus vite,
- recherche d’une meilleure rémunération.
Pour autant, la prudence domine. Les attentes en termes d’augmentation de salaire restent modérées (la majorité des cadres se projettent sur une hausse de 5 % ou moins), et les entreprises elles-mêmes se montrent mesurées sur leurs politiques d’augmentations.
Transparence salariale : un tournant en préparation
Dernier volet majeur de l’enquête : la transparence des salaires.
La future directive européenne, qui entrera en vigueur à partir de juin prochain, va obliger les entreprises à indiquer les fourchettes de rémunération dans leurs annonces et à clarifier les critères de fixation des salaires.
Les cadres y voient globalement une évolution positive, notamment pour réduire les écarts de rémunération, en particulier entre les femmes et les hommes ou entre juniors et seniors.
Les entreprises, elles, apparaissent plus partagées, et surtout peu prêtes : 54 % ne se disent pas prêtes et une grande partie n’a pas encore réellement engagé de plan d’action pour se mettre en conformité.
Au-delà du risque de sanction, cette transparence pourrait pourtant devenir un enjeu majeur de marque employeur : un élément de confiance supplémentaire dans un marché où les profils qualifiés peuvent encore choisir leur employeur.