Il fut un temps où pour mettre en place une campagne de recrutement, les équipes RH briefaient leur agence conseil RH en communication cela va de soi, sur le volume de recrutement et le ton général qu’elles souhaitaient donner à leurs messages.
À partir de ce brief, l’agence, en question, faisait phosphorer un duo de concepteur-rédacteur et de Directeur Artistique, et ensuite présentait un concept, décliné sur différents médias, que le directeur de la communication ou la directrice, regardait de biais, mais sans s’y intéresser vraiment.
Parce que la communication de recrutement, ce n’était vraiment pas son sujet, ni à un moment quelconque un point d’intérêt.
Que les services RH se débrouillent, chacun chez soi et les vaches étaient bien gardées. C’était il y a 20 ans. Hier donc. Inconcevable aujourd’hui. Car la communication RH et la marque employeur, ne peuvent plus faire l’économie de s’imbriquer dans la communication globale de l’entreprise, dans la communication corporate.
Cette évolution s’est accélérée depuis 4 ou 5 ans, depuis que les candidats ont commencé à s’intéresser à l’entreprise non plus sous le prisme exclusif de sa promesse en tant qu’employeur, mais aussi en tant qu’acteur économique et social.
La communication financière, la communication de marque, toutes les actions de communication de l’entreprise vont être sinon scrutées, au moins observées par le candidat, et vont peser dans sa décision de postuler ou pas. C’est dire si la communication RH et la marque employeur sont devenues intrinsèquement liées. C’est dire si le cloisonnement entre service, les fameux silos, n’ont plus lieu d’être aujourd’hui.
Promenons-nous dans les bois…
Pourtant, la route est encore longue avant de voir les responsables de la communication corporate et les RRH marcher main dans la main sur le chemin de la béatitude et de la communion d’esprit à ce sujet. Ils et elles auraient tout intérêt à le faire, mais des années d’indifférence au mieux, de méfiance au pire, ne s’effacent pas d’un coup de réseau social. Car c’est par ce biais, majoritairement, que s’est inséré le ver de la concorde dans le fruit de l’entreprise.
Il est devenu aisé pour les candidats de chercher et trouver des informations sur l’entreprise qui leur propose l’opportunité professionnelle de leur vie. Et il est désormais connu que près des ¾ des candidats se renseignent sur l’entreprise avant de postuler. Et l’on sait aussi d’instinct que la quête de sens (on le sait parce qu’il y a plein d’articles qui le disent, donc c’est forcément vrai…), la quête de sens donc, est un élément déterminant pour les candidats.
Et si l’on ajoute à cela les notions de RSE, les statuts d’entreprise à mission et les raisons d’être que les entreprises commencent à afficher fièrement à leur fronton, alors l’addition de tous ces éléments nous oblige à conclure que la communication corporate a tout à voir avec l’attractivité d’une entreprise.
Bien sûr, nous analysons ici le prisme de la communication, nous avons la faiblesse de croire que celle-ci ne fait que mettre en image et en mots les engagements réels des entreprises, mais ceci est un autre débat, comme le dirait Emmanuel Faber.
Communication corporate et Communication RH : l’œuf et la poule ?
Si ces 2 manières de communiquer co-existent depuis toujours, et s’il s’agit des facettes de la même pièce qui consiste à développer l’image positive de l’entreprise dans son écosystème interne et externe, y en a-t-il une qui prévaut sur l’autre ?
Difficile de se prononcer. La communication de marque ajoute d’ailleurs du piment à cette épineuse question. Les entreprises qui ont une image positive auprès de leurs clients/candidats ont un avantage certain en termes de communication employeur, pour peu que ces entreprises aient le talent de s’en servir de manière cohérente (Burger King, Michel et Augustin, Décathlon, etc.). Le maître mot est peut-être d’ailleurs celui-ci : cohérence.
Imaginer que Naval Groupe communique sur ses métiers en mettant en avant leurs besoins en compétence pour construire un monde de paix, serait aussi incongru que l’éducation nationale vantant les salaires et la qualité de la cantine pour recruter (on a hâte de voir les pouvoirs publics s’emparer de ce sujet…).
C’est pourquoi il est important que chacun comprenne que plus, il y aura de communication interne, plus le discours externe sera efficace : La communication corporate regroupe l’ensemble des actions mises en œuvre pour valoriser l’image de l’entreprise, sous tous les angles.
Vers une communication du 3ᵉ type ?
Et si nous gagions qu’il existe plusieurs types de communication, et qu’elles ont toutes pour bénéfice de développer l’image de l’entreprise auprès de ses différents publics, TOUS ses publics : ses salariés, ses actionnaires, ses clients, ses candidats. Que dire alors de la communication institutionnelle, de la communication de gestion de crise ? La même chose…
Alors dans ce cas, il faudra que tous les acteurs qui communiquent dans l’entreprise, c’est-à-dire tous ceux qui en font partie, à tous les niveaux, unissent leur voix dans un chœur unique qui montera haut, très haut dans le ciel de la marque employeur, au milieu des anges recruteurs.
En fait, au pays des fées, il faut un chef de la communication, ou une cheffe, qui donne le « là » et orchestre tout ce petit monde, des prises de parole digitales au sponsoring, en passant par les réseaux sociaux et la communication de marque.
Les retombées, lorsque la stratégie globale est ainsi calée sur une communication éditoriale unique, sont décuplées, à l’instar d’une stratégie de marque qui suit une partition aux accords parfaits. Fin de la parenthèse pseudo-poétique.
C’est donc aux agences de communication d’instaurer le liant qui fait parfois défaut au sein des organisations, publiques ou privées, les annonceurs, comme nous les appelons si joliment. À moins que ce ne soit aux organisations d’imposer dans leur organigramme le poste de Chef(fe) des communications.
Un poste qui serait garant des différents supports internes et externes, de l’identité visuelle comme de la politique de communication. Une sorte de super Dircom en somme (avec ou sans cape, aucune obligation de ce côté-là…).
Ce rôle de responsable de l’image de l’entreprise permettrait de piloter tous les outils de communications, depuis les médias sociaux aux communiqués de presse en passant, bien évidemment, par la marque employeur. Les relations publiques, dans le sens des relations avec tous les publics, sont au cœur de la marque employeur, et à la croisée des chemins de la communication corporate et de la stratégie globale de visibilité.
La cohérence entre tous ces éléments permettra à tous les discours et à tous les porteurs de discours de se mettre à la disposition de l’image de marque de l’entreprise. C’est une communication du 3ᵉ type à laquelle sont condamnées les organisations.
La communication d’entreprise est forcée de s’acclimater à ce nouvel ordre communicant, où le cloisonnement des messages est synonyme d’incompréhension, car les publics ne sont plus qu’un, et inversement (si vous trouvez la signification de cette phrase, envoyez-nous votre CV !).
Les enjeux de la communication dépassent les guerres d’ego et de chapelle d’un autre temps. La communication corporate, les services marketing, doivent parler aux RH, et les RH doivent s’ouvrir à la notion de marketing RH, sous peine de se voir relégués à un centre de coût, et non à la juste place qui leur revient, au cœur du fonctionnement de toute organisation.
Le temps de l’information-communication est arrivé, de même que celui de l’entreprise responsable DES communications, de SES communications.
Pour finir, il est parfois rageant de constater pour nous, agences de communication, de constater que des écrivains résument en peu de mot ce que nous essayons d’expliquer avec des powerpoint de 30 pages :
“Entre ce que je pense, ce que je veux dire, ce que je crois dire, ce que j’ai dit, ce que tu as envie d’entendre, ce que tu entends et ce que tu comprends, il se peut qu’on ait des difficultés à communiquer, mais essayons quand même !” Bernard Werber