La qualité de vie au travail est un sujet de préoccupation majeur pour les DRH, encore plus en pleine crise sanitaire. Nombreuses entreprises ont mis en place des démarches QVT pour lutter contre les risques psychosociaux chez leurs salariés.
Cependant, favoriser la qualité de vie au travail commence par l’élaboration d’une démarche de prévention des risques professionnels, qui doit s’adapter aux nouveaux modes de travail. Quels sont les indicateurs à surveiller et les leviers à activer ? Quelles sont les bonnes pratiques en matière de QVT ? Notre analyse.
Selon le baromètre 2021 sur la santé et la qualité de vie au travail, mené par Malakoff Médéric Humanis1, les personnes interrogées évaluent la qualité de vie au travail à 6,8/10 en moyenne, une note en augmentation malgré la crise sanitaire.
Par ailleurs, 86% des salariés souhaitent que leur entreprise insère de manière pérenne la prévention des risques et la santé dans sa stratégie2. QVT : que dit la législation ?
Définition QVT
L’ANI (Accord National Interprofessionnel) de 2013 donne une définition de la qualité de vie au travail qui fait consensus :
« La qualité de vie au travail désigne et regroupe sous un même intitulé les actions qui permettent de concilier à la fois l’amélioration des conditions de travail pour les salariés et la performance globale des entreprises, d’autant plus quand leurs organisations se transforment. »
Notons que cet accord a été étendu en 2014, pour intégrer également l’égalité professionnelle.
Le code du travail
Selon le code du travail (article L4121-1), l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés.
Pour ce faire, il doit éviter les risques, évaluer ceux qui ne peuvent être évités et les combattre, adapter le travail, mais aussi mettre en place des actions de formation et d’information. La santé et sécurité au travail relèvent donc de la responsabilité de l’entreprise qui a une obligation de résultat en matière de sécurité des salariés.
La loi Rebsamen
Avec un objectif de simplification, la loi Rebsamen de 2015 a regroupé les thèmes de négociations obligatoires avec les organisations syndicales en trois blocs. Un bloc entier est consacré aux négociations sur la qualité de vie au travail. Autre organe de dialogue social sur le sujet, le CSE a repris les missions de l’ex-comité d’hygiène et sécurité des conditions de travail (CHSCT).
De plus, l’accord national interprofessionnel de 2013 sur la qualité de vie au travail, signé entre les partenaires sociaux, liste les points à prendre en compte pour faciliter la QVT.
Les acteurs et les outils de prévention
Un réseau d’aide
En cas de difficulté, il est possible de faire appel au service de santé au travail dont l’entreprise dépend, à un psychologue du travail, à un ergonome, à des intervenants psychosociaux ou à d’autres consultants spécialisés. D’autres acteurs de la prévention peuvent intervenir comme la Carsat, qui joue un rôle majeur dans la prévention des accidents du travail et les maladies professionnelles, via les conseils de leurs experts et des aides financières.
L’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail (ANACT) est également un référent reconnu qui accompagne les entreprises, délivre des conseils et des formations.
Le document unique
Pour remplir son obligation de sécurité, l’employeur dispose d’un outil concret : le document unique d’évaluation des risques professionnels. Le DUERP répertorie les risques identifiés en matière de santé et sécurité des salariés et recense les mesures de prévention mises en place et à venir, les mesures de protection collectives étant prioritaires.
Comment mettre en œuvre une démarche QVT ?
Différents dispositifs existent, selon les étapes de la démarche, mais la priorité est accordée à la prévention primaire, avec pour credo « agir pour prévenir ».
Les premières étapes
Les objectifs et les enjeux
L’amélioration de la QVT doit s’inscrire dans la stratégie RH de gestion des ressources humaines, avec des objectifs et des enjeux formalisés. La démarche peut être menée de manière participative et gérée par un comité de pilotage. Elle commence par une réflexion sur la réduction des risques psychosociaux, grâce à une démarche de prévention des risques.
Le diagnostic
Mettre en œuvre une démarche qvt nécessite un travail de diagnostic préalable avec les acteurs de l’entreprise concernés. Cela passe par une évaluation précise de la qualité de vie au travail et des risques psychosociaux.
Le plan d’actions
Il s’agit ensuite d’élaborer un plan d’actions concerté et réaliste, qui respecte les objectifs fixés en amont, afin de parvenir à des conditions de travail optimales. Sur ce point, les services des ressources humaines et le management ont un rôle majeur à jouer sur le plan organisationnel et relationnel.
Prévention secondaire
En parallèle, vous pouvez investir dans la formation des acteurs de l’entreprise, afin de les sensibiliser sur le sujet de la qvt et sur la prévention des risques psychosociaux (RPS).
Prévention tertiaire
Au-delà de la prévention, la gestion des caps difficiles doit également être préparée, avec en particulier un dispositif d’écoute et d’accompagnement. Ainsi, l’accompagnement des équipes par les managers ou le DRH, en période de changement ou en cas de difficulté, participe à la réduction des rps.Afin de pérenniser la démarche QVT, une évaluation des actions réalisées et un suivi régulier de certains indicateurs doivent être effectués.
Les indicateurs clés
Les principaux risques psychosociaux référencés sont le stress au travail, le harcèlement moral, le harcèlement sexuel et la violence au travail.
Facteurs de risques et conséquences
Afin de prévenir ce genre de situations, il est indispensable d’identifier :
- Les facteurs de risques psychosociaux : surcharge de travail, tâches répétitives, climat social délétère, relations managériales compliquées… peuvent engendrer épuisement ou burn-out, et d’autres signes d’usure professionnelle et/ou de souffrance au travail.
- Les risques liés à de mauvaises conditions de travail des salariés : risques métiers (dangerosité, pénibilité), accident du travail, maladie professionnelle, absentéisme, et dans le pire des cas, suicide au travail.
Les conséquences peuvent être désastreuses du point de vue humain, du point de vue de l’entreprise (déficit d’attractivité), mais aussi d’un point de vue économique (coût pour l’entreprise et pour la sécurité sociale).
Les indicateurs à surveiller
Les impacts des rps tant sur la santé physique et la santé mentale que sur la qualité du travail peuvent être considérables. Le travail de prévention s’effectue, entre autres, grâce à certains indicateurs.
Le taux de turnover et le taux d’absentéisme sont des indicateurs à suivre de près car, trop élevés, ils sont le signe d’un mal-être. Dans le même esprit, les taux d’accidents du travail, d’inaptitudes et de maladies professionnelles sont également à surveiller.
Autre indicateur : la perception de la qualité de travail, plus difficile à mesurer, peut être évaluée par le biais d’un questionnaire envoyé à chaque collaborateur, afin d’évaluer sa satisfaction, son sentiment d’équité, ses attentes…
Mais il n’est pas toujours facile de percevoir le mal-être : en effet, dans un même environnement de travail, le ressenti des salariés varie. L’ANI de 2013 donne une définition de la notion de perception :
Les conditions dans lesquelles les salariés exercent leur travail et leur capacité à s’exprimer et à agir sur le contenu de celui-ci déterminent la perception de la qualité de vie au travail qui en résulte.
Les bonnes pratiques en matière de QVT
Pour contribuer à améliorer la situation, tous les acteurs de l’entreprise ont leur part de responsabilité.
Le rôle de la direction et du management
Voici les principales actions qui permettent de prévenir les risques psychosociaux et d’améliorer la qualité de vie au travail :
- Améliorer les conditions de travail afin de prévenir les TMS (troubles musculo squelettiques), diversifier les positions, vérifier l’ergonomie des postes de travail et veiller au confort des salariés.
- Réduire la pénibilité avec de bonnes conditions de travail physiques et psychiques.
- Faciliter la conciliation vie professionnelle vie personnelle : contrôler le temps de travail et la charge de travail, respecter le droit à la déconnexion, donner la possibilité d’adapter ses horaires, opter pour un télétravail « mesuré ».
- Renforcer la satisfaction au travail (sens, vision globale, diversité) ; agir sur le contenu du travail, c’est-à-dire sur le degré d’autonomie dont dispose le salarié dans l’organisation du travail et la réalisation de ses missions, ainsi que sur le sens donné au travail ; ne pas omettre de reconnaître la qualité du travail réalisé.
- Instaurer un bon climat au niveau des relations sociales, avec un dialogue permanent ; entretenir des relations de travail constructives entre managers et salariés.
- Prévenir le stress (rôle des managers et de la DRH) : accompagner au changement, former, rassurer. Non seulement ces actions contribuent à un travail de meilleure qualité, mais elles augmentent également la motivation et la productivité, donc la performance de l’entreprise. Le rôle des salariés
- Améliorer sa qualité de vie relève aussi de la responsabilité et/ou des choix des collaborateurs. Par exemple, ne pas lire ses mails depuis son domicile, respecter et profiter du droit à la déconnexion.
Autre élément important : le temps de trajet domicile-lieu de travail. Choisir un mode de transport adapté, se rapprocher de l’entreprise, ou adapter ses horaires pour des déplacements en décalé, font partie des choix de vie possibles pour améliorer la qvt.
Ces actions sont complémentaires et ont des effets positifs déterminants sur le bien-être au travail. De plus, bien-être et efficacité au travail vont généralement de pair.
Les effets de la crise sanitaire
Les différentes périodes de confinement liées au Covid19, le télétravail généralisé… ont modifié les modèles et les conditions matérielles de travail. La période de crise nécessite donc une approche du travail différente avec des adaptations organisationnelles, notamment pour lutter contre le sentiment d’isolement ressenti par 30 à 35 % des salariés3, mais aussi pour leur permettre de concilier vie professionnelle et vie personnelle, une difficulté pour 35 % des salariés4.
Si une évolution a eu lieu depuis le début de la crise, en 2020, 45 % des salariés se sentaient cependant plus fatigués sur le plan physique et psychologique. De plus, on assiste à une chute du dynamisme (64%) et à une augmentation du stress chez les salariés en télétravail5.
A contrario, la crise sanitaire a également eu des effets positifs sur la qvt, puisque beaucoup de salariés soulignent une autonomie accrue, davantage de flexibilité dans les relations et une plus grande compréhension de la part de l’entreprise.
Enfin, être heureux au travail rend 31 % plus productif6 ! L’entreprise a donc tout à gagner à travailler à l’amélioration de la qualité de vie au travail puisqu’elle permet également d’agir sur la performance.
- Baromètre Santé et Qualité de Vie au Travail de Malakoff Humanis, 2021
- https://newsroom.malakoffhumanis.com/actualites/la-sante-au-travail-a-lepreuve-du-covid-fa22-63a59.html
- 12ème édition du Baromètre Santé et Qualité de Vie au Travail de Malakoff Humanis, 2021
- https://fr.hrmaps.eu.com/infographie-et-la-qvt-dans-tout-ca/
- Étude de perception Ifop pour Malakoff Humanis : La Santé au Travail à l’épreuve du Covid, été 2020