La RSE, c’est ce terme à la mode sur lequel surfent de nombreuses entreprises. Mais voilà : quand les actions ne sont pas à la hauteur des engagements, la tentation est grande de sublimer la réalité pour faire briller la vitrine de son entreprise… On enjolive les bilans, on surjoue l’égalité des chances, on revendique des engagements encore balbutiants… Bref, on raconte une histoire plus flatteuse que fidèle.
Mais à quel prix ? Car mentir sur votre politique RSE, c’est engager votre crédibilité… au risque de vous faire accuser de RSE-washing.
Le RSE-washing, qu’est-ce que c’est au juste ?
Commençons par un petit test de connaissances !
Vous avez sûrement déjà entendu parler du greenwashing, cette pratique qui consiste à se donner une image écoresponsable sans réel engagement environnemental. Peut-être connaissez-vous aussi le pinkwashing, qui instrumentalise la cause LGBT+ à des fins marketing. Mais avez-vous déjà croisé le terme social washing ? Il désigne les entreprises qui revendiquent haut et fort leur attachement à la diversité, à l’inclusion ou encore au bien-être au travail – avec discours inspirants, photos de corbeilles de fruits et ambiance “start-up familiale” à l’appui – alors que la réalité, faite de burn-outs à répétition et de management toxique, en est bien éloignée.
Le RSE-washing s’inscrit dans cette même logique : il s’agit de communiquer de manière biaisée ou exagérée sur sa stratégie de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), dans le but de soigner son image, notamment auprès des candidats à l’embauche.
Mais pourquoi certaines entreprises prennent-elles un tel risque ? Parce qu’en 2025, les attentes des talents ont profondément évolué : les candidats ne recherchent plus seulement un poste, mais un alignement de valeurs. Ils scrutent les engagements sociaux, environnementaux et éthiques des entreprises, et sont de plus en plus attentifs à leur cohérence entre le discours et les actes. Le RSE-washing, loin d’être anodin, peut alors se retourner contre les employeurs, entamant leur crédibilité et leur attractivité.
Autrement dit, dans un monde du travail en quête de sens, les promesses creuses ne suffisent plus : place à la transparence, à l’authenticité… et à l’action concrète.
Comment repérer le RSE-washing ?
À l’heure où la marque employeur se fabrique, où la vérité et le mensonge se côtoient, comment déceler concrètement du RSE-washing dans le discours d’une entreprise ? Voici quelques signaux d’alerte, à analyser avec un œil critique :
- L’emploi de termes vagues : “Engagé”, “durable”, “éthique”… Des mots qui sonnent bien, mais qui restent flous s’ils ne sont pas accompagnés d’exemples précis, de chiffres concrets ou d’actions mesurables.
- Des chiffres qui ne correspondent pas aux documents officiels : Méfiez-vous des infographies flatteuses ou des posts LinkedIn triomphalistes. Un audit ou un rapport extra-financier peut parfois raconter une tout autre histoire.
- Des actes qui ne se joignent pas aux paroles : Une entreprise peut tenir un discours vertueux, mais ne proposer aucune politique RH adaptée, ni indicateur de suivi, ni moyens concrets pour atteindre ses objectifs.
- Le manque de transparence : Quand les données sont absentes, inaccessibles, ou volontairement édulcorées, c’est souvent que la réalité ne soutient pas le storytelling. Une politique RSE sérieuse accepte d’aborder aussi ses zones d’ombre.
- Les faux labels : Certaines entreprises affichent des certifications ou labels peu rigoureux, voire inventés, pour renforcer artificiellement leur crédibilité. Il est essentiel de vérifier la légitimité de ces reconnaissances.
- Les promesses non tenues : Une charte d’engagement signée en grande pompe mais jamais mise en œuvre, des objectifs annoncés sans calendrier ni évaluation… L’absence de suivi est un marqueur classique de RSE-washing.
- Des actions ponctuelles, mais pas intégrées à une réelle stratégie : Une entreprise met en avant une initiative « responsable », mais cela reste un coup isolé, sans lien avec ses processus internes, sa chaîne de valeur ou ses choix économiques.
- Le détournement des sujets à la mode : Utiliser des sujets populaires comme le développement durable, la diversité ou le bien-être au travail uniquement pour surfer sur une tendance, sans engagement réel ou profond.
- Le recours excessif aux influenceurs ou aux ambassadeurs externes : Plutôt que de faire témoigner ses propres collaborateurs ou bénéficiaires des politiques RSE, l’entreprise se cache derrière des personnalités publiques ou des agences d’image.
- Des contradictions évidentes : Par exemple, promouvoir l’égalité hommes-femmes tout en ayant une direction exclusivement masculine ; ou afficher un engagement pour l’environnement tout en polluant massivement ailleurs.
Éviter le RSE-washing : comment faire ?
Pour ne pas tomber dans le piège du RSE-washing, un seul mot d’ordre : agir avec sincérité et cohérence. Il ne s’agit pas de viser la perfection, mais de faire preuve de lucidité, d’engagement et de transparence. Voici les leviers essentiels pour construire une politique RSE crédible… et crédibilisée.
Miser sur la transparence
La transparence, ce n’est pas simplement dire ce qui fonctionne. C’est aussi oser parler de ce qui reste à faire. Accepter de partager ses marges de progression, ses échecs, ses retards : cela ne fragilise pas une marque employeur, au contraire. Cela renforce l’authenticité du discours et inspire confiance. Un candidat ne s’attend pas à rejoindre une entreprise parfaite, mais à travailler dans un environnement honnête, où les enjeux sont assumés.
Déployer une vraie stratégie
Mettre en place une démarche RSE ne peut pas se résumer à des actions isolées ou à des effets d’annonce. Elle doit être structurée, pilotée, intégrée à la vision globale de l’entreprise. Cela implique :
- Une analyse des enjeux prioritaires (matérialité) ;
- Des objectifs clairs, mesurables et datés ;
- Des indicateurs de suivi réguliers ;
- Une implication transversale : direction, RH, managers, collaborateurs, parties prenantes…
En bref : la RSE ne doit pas être un supplément d’âme, mais un pilier de la stratégie d’entreprise.
Recruter (ou s’entourer) d’experts RSE
La complexité des enjeux sociétaux, environnementaux et éthiques exige des compétences spécifiques. Faire appel à un responsable RSE, à des consultants ou à des organismes indépendants, c’est reconnaître que la RSE est un métier. Ce n’est ni une fonction de communication, ni une simple case à cocher. Un expert saura structurer les démarches, évaluer leur pertinence, garantir leur sincérité… et éviter bien des maladresses.
Impliquer les collaborateurs
Une démarche RSE crédible ne peut pas être décidée en vase clos. Elle doit vivre à travers les équipes, être nourrie par leurs retours, leurs idées, leurs attentes. Cela passe par des espaces d’expression, des projets collaboratifs, une gouvernance participative. Car une politique RSE déconnectée du terrain finit toujours par sonner faux.
Faire de la cohérence une boussole
Enfin, chaque décision compte. On ne peut pas prétendre promouvoir le bien-être au travail tout en normalisant des horaires à rallonge. On ne peut pas afficher une posture éthique tout en externalisant ses pratiques les plus problématiques. Il est crucial de passer au crible chaque pan de son activité, et d’aligner ses valeurs affichées avec ses choix réels – économiques, sociaux, managériaux, commerciaux.
En résumé : la meilleure arme contre le RSE-washing, c’est l’intégrité.
Communiquer, oui. Mais sur des fondations solides, incarnées, évolutives. Dans un monde où l’impact compte autant que l’image, ce sont les actes qui parlent le plus fort.