Recruter des profils pénuriques : un défi pour les entreprises ?

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En 2025, le marché du travail reste sous pression. Tandis que certains postes séduisent facilement les candidats, d’autres peinent à être pourvus. Secteurs peu attractifs, compétences rares, exigences plus importantes des candidats… autant de facteurs qui rendent le recrutement plus complexe. Face à cette réalité, les équipes RH doivent repenser leurs stratégies et innover pour attirer les bons profils.

Quels sont les profils pénuriques ?

Un profil pénurique, c’est celui dont les compétences sont à la fois rares et très demandées, ce qui rend leur recrutement difficile.

Certains métiers « en tension » nécessitent des connaissances très pointues ou encore émergentes sur le marché de l’emploi. D’autres souffrent d’un manque d’attractivité dû aux conditions de travail ou aux évolutions du secteur.

On peut classer ces profils en trois grandes catégories :

  • Les profils hautement qualifiés, que les entreprises recherchent beaucoup pour leur expertise, notamment dans l’IT, l’ingénierie ou en data science.
  • Les professionnels chevronnés. Les seniors sont prisés pour leur expérience, surtout dans des secteurs comme la finance, l’audit ou le management de transition. Cependant, ils sont souvent bien installés dans leur poste et peu enclins à changer d’entreprise.
  • Les salariés de secteurs moins attractifs, qui souffrent d’une mauvaise image ou qui travaillent dans des conditions difficiles (restauration, BTP ou aide à domicile).

Quelles causes expliquent la pénurie de talents ?

La rareté des compétences pointues

Ces dernières années, les technologies ont rapidement et profondément transformé les métiers. La digitalisation massive des entreprises a fait exploser la demande pour des compétences techniques précises, sans que l’offre ne puisse y répondre suffisamment. Résultat ? Un décalage grandissant entre les profils disponibles et ceux que les entreprises recherchent.

Certains métiers sont particulièrement en tension, notamment ceux liés à l’intelligence artificielle, à la cybersécurité et à la data science. Plusieurs éléments aggravent la pénurie :

  • Une baisse d’intérêt pour les filières scientifiques. En France, les effectifs dans ces filières ne cessent de diminuer.
  • Un manque de diversité. Les femmes restent sous-représentées dans les secteurs technologiques, ce qui limite encore plus le nombre de candidats potentiels.
  • Des recrutements trop rigides. Certains recruteurs imposent des critères trop restrictifs (diplômes, expérience minimum), écartant ainsi des profils qui pourraient convenir.

D’autres secteurs sont concernés, comme les métiers artisanaux (menuisiers, charpentiers, chaudronniers, etc.). Ils nécessitent un savoir-faire précis qui ne s’acquiert qu’avec l’expérience.

La faible attractivité de certains secteurs

Des conditions de travail parfois pénibles, peu de perspectives, une absence de reconnaissance sociale… des postes subissent une réelle désaffection des talents.

C’est même tout un secteur qui peut souffrir du manque d’attractivité :

  • La restauration. Bien que les compétences existent, les candidatures se font rares. En cause, une nouvelle perception du travail chez les jeunes générations, qui privilégient un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Travailler tard le soir, le week-end ou avec des horaires décalés devient un frein pour de nombreux candidats potentiels.
  • L’industrie. Ses contraintes horaires (les 3×8) rendent le secteur peu attractif malgré des salaires parfois compétitifs.
  • Le secteur médical et paramédical. Des sous-effectifs chroniques qui engendrent une pression de plus en plus forte sur les équipes et des rémunérations trop basses nuisent à ce secteur. À cela s’ajoute un phénomène de « déserts médicaux » dans certaines zones rurales.

L’inadéquation entre l’offre et la demande

Dans des secteurs comme le numérique, les connaissances changent si rapidement qu’elles deviennent obsolètes en quelques années. Les jeunes diplômés n’ont pas toujours le profil recherché, et leurs acquis perdent vite de leur pertinence. Résultat : une inadéquation constante entre l’offre et la demande. Pour y remédier, les formations en apprentissage ou en alternance constituent des solutions plutôt efficaces. Les entreprises doivent, elles aussi, anticiper leurs besoins et suivre l’évolution du marché, en améliorant leur formation interne pour favoriser le développement des compétences de leurs collaborateurs.

Parallèlement, les attentes des candidats se transforment. Un bon salaire ou un emploi stable ne suffit plus pour attirer les talents. Certaines entreprises n’ont pas encore pris la pleine mesure de ces évolutions et ne réussissent plus à recruter faute d’avoir su s’adapter. Elles doivent moderniser leurs méthodes de recrutement et adopter une approche plus authentique pour capter l’attention des talents et s’aligner avec les réalités du marché.

Quelles conséquences pour les entreprises qui recherchent des profils rares ?

Des difficultés à pourvoir des postes stratégiques

Les entreprises peinent à recruter ! En 2024, une enquête de France Travail révèle que 57,4 % des embauches se sont avérées difficiles. Si ce chiffre est en légère baisse par rapport à 2023 (61 %), il illustre bien un problème qui persiste depuis plusieurs années.

Les postes stratégiques rattachés à la direction générale, au marketing, au numérique ou encore au financier, exigent des compétences pointues, des hard et soft skills qui allient la précision technique et la capacité à piloter des projets d’envergure. Ces profils sont parmi les plus rares. La demande dépasse largement l’offre, et les talents qualifiés, déjà en poste, ne sont pas en recherche active.

Et le phénomène n’est pas seulement sectoriel, il est aussi géographique. Certaines régions bénéficient d’une attractivité économique et démographique forte, tandis que d’autres n’attirent plus. Il faut dire que, même dans les bassins d’emploi dynamiques, les entreprises peuvent rencontrer des difficultés à recruter. Les candidats, mieux informés et plus exigeants, disposent aujourd’hui de plus de choix et arbitrent selon des critères qui vont bien au-delà du salaire. Ils prennent en compte la qualité de vie, les possibilités d’évolution, la flexibilité du travail et les valeurs de l’entreprise.

Les répercussions sur la croissance et l’innovation

Lorsqu’un poste pénurique reste vacant trop longtemps, cela crée des effets sur la productivité et la performance des entreprises. Cette situation fragilise la stratégie globale de l’entreprise, car elle limite sa capacité à répondre efficacement aux opportunités de croissance et d’innovation.

Comble du comble, cette décroissance, loin de redorer l’image de l’entreprise, diminue son attractivité sur le marché de l’emploi. Et elle rend le recrutement des profils en tension plus difficile ! Cette difficulté peut également engendrer une augmentation du coût du recrutement, car les recruteurs vont chercher à compenser en offrant des rémunérations et des avantages supérieurs à la concurrence. Si ces efforts sont parfois récompensés, ils pèsent néanmoins sur la rentabilité et compliquent encore plus la gestion des ressources humaines.

Une nécessaire gestion proactive des recrutements

Dans un contexte de pénurie de talents, comment gérer les recrutements ?

Avant tout, l’entreprise doit clarifier son besoin pour améliorer son processus de recrutement. La personne qu’elle souhaite recruter est-elle vraiment un profil rare ? Quelle stratégie adopter pour recruter le bon profil ? Pour le savoir, elle peut se poser ces questions :

  • Dans quelle mesure l’expertise doit-elle être poussée ?
  • Quel est le niveau d’expérience recherché pour cet emploi ? Un profil senior est-il obligatoire ?
  • Est-ce que l’entreprise est dans un secteur d’activité de niche ou qui nécessite d’être à la pointe de l’innovation ?
  • Quelle est la liste des compétences indispensables ? Les professionnels disposant de ces savoir-faire sont-ils si peu nombreux sur le marché ? Peuvent-ils être formés en interne ?

L’entreprise doit redoubler d’efforts pour rester attractive, anticiper les attentes des candidats et élargir son champ de recherche. Elle peut miser sur la formation interne ou le recrutement à l’international.

Les meilleures stratégies pour recruter les profils pénuriques

Rendre sa marque employeur séduisante

Attirer des talents rares nécessite une identité forte et différenciante. Dans un marché où les candidats ont l’embarras du choix, l’entreprise doit susciter l’envie, plus que ses concurrents.

Pourquoi un candidat préfère-t-il une entreprise à une autre ? Si les critères de choix restent propres à chacun, attirer durablement et surtout fidéliser exige une marque employeur attrayante. Elle repose avant tout sur l’authenticité : les valeurs de l’entreprise, sa culture et son engagement doivent résonner avec les attentes des candidats. Pour cela, il faut miser sur de véritables atouts :

  • un cadre de travail flexible avec des options de télétravail et des horaires aménagés ;
  • une politique salariale attractive, avec des primes et des avantages complémentaires ;
  • des opportunités d’évolution et un accompagnement personnalisé pour favoriser la progression interne.

Vous pouvez faire preuve d’originalité pour mieux marquer les esprits, mais ne cherchez pas à paraître ce que vous n’êtes pas. Restez vrai ! Les témoignages de collaborateurs, les coulisses de l’entreprise, les moments forts du quotidien professionnel permettent de donner une image concrète et engageante de l’entreprise. Pour recruter des profils pénuriques, on doit penser comme un candidat et se demander ce qu’il attend de son futur employeur.

Diversifier les canaux de recrutement

Si les jobboards, les CVthèques ou les sites carrières restent conseillés pour le sourcing, ils ne suffisent plus pour attirer les talents rares. L’enjeu est de se rendre visible là où ces candidats ne vous cherchent pas encore. Pour cela, utilisez les réseaux sociaux. Selon les métiers ciblés, il peut être plus pertinent d’exploiter Twitter, Facebook, Instagram ou TikTok qu’un réseau social professionnel comme LinkedIn. Votre stratégie de réseaux sociaux doit s’adapter à ces candidats passifs qui ont besoin d’être séduits de façon inattendue.

Le recrutement peut également passer par des partenariats avec des écoles et des universités. Proposer des stages ou des contrats en alternance permet d’identifier et de former des talents avant même leur arrivée sur le marché du travail. Cette approche est particulièrement efficace dans des domaines comme l’informatique, l’ingénierie ou la communication, où la compétition pour les meilleurs jeunes diplômés est féroce.

Enfin, le recrutement par cooptation permet d’accéder à des profils qualifiés grâce aux réseaux personnels des collaborateurs.

Améliorer l’expérience candidat

Les recruteurs sous-estiment l’importance de l’expérience candidat, alors qu’elle peut fortement nuire ou avantager l’entreprise. Un processus de recrutement trop long ou trop complexe risque de décourager les talents. Les profils les plus recherchés connaissent leur valeur sur le marché. Ils sont donc généralement plus exigeants.

Dès la publication de l’offre d’emploi, donnez tous les éléments pour que le candidat puisse se projeter. Une annonce claire, transparente et attractive, qui met en avant les conditions de travail et les évolutions possibles, renforce l’engagement. Le salaire, par exemple, qui reste un critère décisif pour la plupart des postulants, doit être affiché sans ambiguïté. Et puis, un ton original ou une touche d’humour peuvent aider à se distinguer et à attirer l’attention.

Ensuite, soyez réactif ! Plus de 60 % des candidats abandonnent s’ils ne reçoivent aucune réponse dans la semaine qui suit leur acte de candidature. Les ATS facilitent le suivi et améliorent l’expérience candidat, notamment grâce à des messages ciblés sur l’avancement de la candidature.

Former talents et collaborateurs

La pénurie de talents oblige les entreprises à repenser le processus de recrutement. Certains candidats n’ont peut-être pas encore toutes les compétences techniques requises, mais ils disposent des soft skills et de la motivation nécessaire pour apprendre et s’adapter rapidement. Miser sur ces profils permet d’élargir le vivier de talents disponibles en favorisant une montée en compétences progressive.

La formation ne concerne pas seulement les recrues, mais aussi les employés déjà en poste. Le reskilling (formation vers un nouveau métier) et l’upskilling (acquisition de compétences complémentaires) constituent des solutions efficaces pour anticiper les évolutions du marché et combler les manques en interne. Former un salarié à un métier totalement différent ou l’amener à se perfectionner dans son domaine offre à l’entreprise un avantage compétitif tout en fidélisant les employés.

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